LA COURSE À L’ÉRADICATION DES MALADIES TROPICALES NÉGLIGÉES
Alison Krentel, Ph. D., croit que personne ne devrait être laissé pour compte

Dans le monde, plus de 1,5 milliard de personnes sont touchées par des maladies tropicales négligées et doivent subir des interventions préventives ou curatives. Selon l’Organisation mondiale de la Santé, les maladies tropicales négligées constituent un groupe diversifié de 21 affections causées par une variété d’agents pathogènes, notamment des virus, des bactéries et des parasites qui prolifèrent souvent dans les pays à climat tropical et subtropical.
Alison Krentel, Ph. D, chercheuse principale à l’Institut de recherche Santé Bruyère et professeure agrégée à l’Université d’Ottawa veut un monde où les maladies et leurs effets dévastateurs n’existent plus.
Qu’est-ce qui rend ces maladies « négligées »? Même si ces maladies touchent un nombre impressionnant de personnes dans le monde, elles reçoivent rarement l’attention et les ressources nécessaires par rapport aux autres principales maladies transmissibles comme le VIH/sida, le paludisme ou la tuberculose. Les maladies tropicales négligées ont de graves conséquences sanitaires, sociales et économiques pour les personnes et les régions touchées.
« Les maladies tropicales négligées affectent essentiellement les personnes vivant dans des conditions précaires et perpétuent des cycles de marginalisation et de pauvreté pour ces gens », explique madame Krentel, qui consacre ses études de recherche à l’équité et à l’efficacité des programmes de santé publique en matière de maladies infectieuses dans de nombreux pays. « Si nous voulons aider la société dans son ensemble, nous devons mettre un terme à cette négligence et veiller à ce que tout le monde ait accès aux traitements et aux soins. »
Ne laisser personne pour compte
Une partie des travaux de la chercheuse porte sur l’administration massive de médicaments, une stratégie sanitaire préventive qui consiste à traiter tous les membres d’une population donnée, qu’ils soient infectés ou non. Pour éradiquer les maladies, il faut que les gens participent à ces programmes, mais il peut être difficile d’atteindre la masse critique nécessaire.
De ce fait, bien que la maladie touche des millions de personnes chaque année, nombreuses sont celles qui ne reçoivent jamais de traitement, ce qui freine les efforts d’éradication des maladies pour des régions entières. Par la recherche, nous pourrons mettre en évidence les facteurs derrière le non-traitement de certains individus, découvrir pourquoi certaines personnes nous échappent et trouver des moyens pour améliorer leur prise en charge.
« Nos recherches nous aident à savoir qui est laissé pour compte lors des traitements et pour quelle raison; il suffirait peut-être de rassurer les gens sur les effets secondaires possibles, de leur donner des instructions plus claires ou simplement de combler le fossé qui existe entre les fournisseurs de soins de santé, les bénévoles de santé communautaire et la population visée », poursuit-elle. « C’est un défi auquel sont confrontés tous les intervenants de santé publique; il est donc important de continuer à chercher qui est laissé pour compte et comment les atteindre. »
La fin des maladies tropicales négligées
L’éradication des maladies tropicales négligées n’est pas une mince affaire. La collaboration restera toujours la pierre angulaire des stratégies de santé publique fructueuses, surtout lorsque tout se joue sur l’échiquier mondial.
Madame Krentel dirige The Threads Lab, où la recherche pragmatique et sa mise en œuvre contribuent au mouvement mondial orienté vers une meilleure compréhension des défis et des obstacles qui nuisent à l’efficacité des programmes sanitaires. Le groupe travaille en partenariat avec des concitoyens, d’autres chercheurs et des intervenants de programmes de santé nationaux afin de concevoir et de valider des solutions réalisables, créant ainsi une base de données concrètes pour élargir et pérenniser ces solutions.
Son travail avec iCHORDS, une communauté de praticiens, permet de mettre en relation plus de 500 personnes de plus de 50 pays, qui œuvrent au carrefour des maladies tropicales négligées et de la recherche sociale et comportementale, et de fournir une plateforme de communication, de mentorat et d’échange de connaissances.
« Pour parvenir à un avenir exempt de maladies tropicales négligées, nous avons besoin de gens issus de tous horizons : gouvernement, population générale, chercheurs, et fournisseurs de soins », précise madame Krentel. « Les efforts que nous déployons au niveau local, ici à l’Institut de recherche Santé Bruyère, ont une portée mondiale, et chaque fois que nous nous appuyons sur notre faculté à faire partie d’un tissu social plus large, nous nous donnons la chance de contribuer à la création d’un avenir sans maladies. »